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Tradition et organisation sociale – Moossou : Un exemple de résistance à la modernité

En plein cœur de Grand-Bassam sur la route de Bonoua, "Moossou", village Abouré est perdu dans l'urbanisation galopante de cette cité.

Mais, « Moossou », l’âme de Grand-Bassam, siège de la royauté Abouré n’est guère aliené. « Malgré les effets de la civilisation occidentale et l’influence de la modernisation sur les mœurs, les usages et les coutumes, la vie politique, sociale et culturelle actuelle du village de Moossou, s’articule autour de trois institutions maîtresses héritées de la tradition Akan et spécifiquement dans le groupe Abouré », soutient mordicus M. Aka Aimé Joseph, cadre Abouré et Président de la Mutuelle de développement de Moossou. « Moossou : un cas de maintien des valeurs et civilisations africaines ». Tel est le thème de sa communication prononcée le mardi dernier à la Maison du patrimoine. Ce dans le cadre de la deuxième édition du Festival international de la Route des Rois.

Les « Otchouon » (familles claniques), les « Ofwa » (classes d’âge) et le « Mligbli » » (Monarchie héréditaire) constituent les valeurs de la civilisation à Moossou.

Comme dans tous les villages Abouré, à Moossou, il existe sept clans à savoir : les Samandje-Mle (la chaîne aînée de tous les clans), les Ogboun appelés Assokopouè, les Moho, les Wossouan, les Assomoho, les Wossan Ehe, les Adjeke-Poue.

Et M. Aka Aimé Joseph d’expliquer le rôle de ces clans : « Le clan Samandje-Mlé est le clan royal. C’est de ce clan que sont issus les Rois de Moossou. Le clan Ogboun ou Asokopouè est le détenteur du pouvoir militaire, fournisseur des troupes ou Sanflan et également propriétaire terrien, il fournit les régents.

Organisation des familles

Le clan Moho assure le service officiel d’information. C’est un clan très actif au plan économique et est souvent prospère.
Tous les autres clans ont des qualités spécifiques et jouent un rôle précis dans la communauté ».

Cette organisation sociale hiérarchisée est très présente dans la cellule familiale Selon le Président de la Mutuelle de développement de Moossou, la famille ou Otchouon est l’ensemble de tous les parents utérins, à quelque degré qu’ils appartiennent appelé « le Blata » ou descendants d’une même arrière grand-mère.

Chaque famille a un symbole : le « Ebihim », une chaise qui constitue la cellule sociale de base. Une chaise dans laquelle les membres d’une même famille se reconnaissent, s’organisent matériellement. A partir de la huitième génération, un Blata se décompose en d’autres « Mlata » autour d’autres chaises ou « N’Bihin ».

Précieuses et sacrées, ces chaises familiales sont généralement abritées dans une salle dite « Adisye » où s’organisent les réunions, les fêtes et les funérailles de la famille.

Chaque année, en principe, de façon périodique les chefs de famille organisent une cérémonie de toilettage des chaises. Pour l’occasion, des offrandes sont offertes : moutons, poulets (immolés), « foufou » d’igname après les avoir nettoyer dans la lagune et badigeonner de kaolin. Cette organisation des familles se poursuit dans l’univers des morts. Le cimetière est à cet effet organisé selon ces clans.

Chez les Abouré, l’héritage est matrilinéaire, mais de façon spécifique se fait dans une même branche. La succession se fait sur la chaise et autour de la chaise.

Les classes d’âge et les générations

« Ebe », c’est ainsi que s’appelle les membres d’une classe d’âge ou « ofwa ». Moossou a conservé la division du village en deux principaux quartiers correspondant aux quartiers créés par les deux premières générations. Dans chaque quartier, chaque génération est subdivisé en quatre classes d’âge.
– les Attiblé, les aînés, les sages, les grands conseillers de la génération.
– les Baoulé, les intrépides, fer de lance dans les conflits.
– Les Djamian – min libé, les cadets
– Les Djamian, les benjamins

Chaque génération s’organise autour des fonctions et responsabilités suivantes : les chefs de génération ou chefs d’Etat major, les héros ou Sanflan, les portes paroles, les crieurs publics et les batteurs du tam-tam parleur. A chacune de ces fonctions correspond un clan bien précis.

Malgré l’introduction du christianisme depuis 1986 à Moossou, la tradition continue de rythmer la vie des populations.

La présentation du nouveau-né et la fête de la maternité et de la naissance, le rituel des femmes pour conjurer les calamités « la danse du N’Hour », le rituel en cas de relations sexuelles incestueuses, le « Môtô-môt », le tribunal coutumier, etc animent encore la vie des habitants de cette localité.

Source : Le Patriote

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